Un canal sans platanes – L'Officiel du Canal du Midi

Un canal sans platanes

En 1878, l’écrivain Hector Malo, voyageant sur le canal du Midi, s’extasie devant le spectacle des peupliers plantés le long de ses berges : «… agitant dans l’air tranquille du matin leurs feuilles toujours émues, leur longue alignée selon la rive formait un épais rideau vert qui arrêtait les rayons obliques du soleil et ne laissait venir à nous qu’une douce lumière tamisée par le branchage».

En ce XXIe siècle qui voit un grand nombre de platanes bordant le canal abattus afin d’éviter la propagation du chancre coloré, nous sommes surpris que les voyageurs mentionnent, il y a cent cinquante ans, non cette espèce mais, outre les peupliers, des ormes, des acacias, des marronniers…

En réalité, P.-P. Riquet avait prévu d’agrémenter «sa» voie d’eau à l’aide d’arbres fruitiers et de diverses espèces décoratives, mais absolument pas à l’aide de platanes. Ce n’est que vers la fin du XIXe siècle que cette espèce l’emporta sur les autres, dessinant le paysage auquel nous sommes habitués, qui est en fait relativement récent.

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C’est le mérite du récent ouvrage de Jean-Pierre Piniès, «Je vous écris du canal du Midi», de mettre en valeur ce constat en regroupant les témoignages d’écrivains et de voyageurs qui ont emprunté cette voie d’eau du XVIIe siècle à nos jours. En effet, dès sa mise en eau, et jusqu’en 1858, le canal permettait aux voyageurs de se rendre de Toulouse à Agde en quatre jours grâce à la barque de poste, bateau couvert qui transportait entre cinquante et cent passagers. La promiscuité y étant souvent désagréable, fut créé, au XVIIIe siècle, un «salon» plafonné avec sièges et fenêtres vitrées dans lequel les passagers étaient à l’abri des intempéries comme du soleil, tandis qu’un garde était chargé de maintenir l’ordre à bord.

On faisait étape dans les auberges pour les «dînées» et/ou pour la nuit, et, le canal de Riquet évitant Carcassonne, la halte la plus proche jusqu’à la Révolution fut à Trèbes. Au XIXe siècle, les couchées furent supprimées, car les bateaux circulant désormais jour et nuit il suffisait de trente-six heures pour aller de Toulouse à Béziers, mais c’est la concurrence du chemin de fer qui mit fin à ce type de transport.

Claude Marquié

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