Opération sauvetage du canal du Midi – L'Officiel du Canal du Midi

Opération sauvetage du canal du Midi

La voie d’eau pourrait perdre son inscription au Patrimoine mondial de l’Unesco en 2019.
L’Etat veut partager la gouvernance et l’entretien du canal avec les collectivités locales.

Une maladie peut en cacher une autre. Le chancre coloré, ce champignon qui dévaste depuis 2006 les platanes du canal du Midi en détruisant sa belle voûte verte, a fait comprendre la fragilité de cet ouvrage remarquable construit il y a trois cent cinquante ans entre Toulouse et Sète. Berges laissant filtrer l’eau, chemins de halage et ouvrages d’art mal entretenus, pollution par les eaux usées des bateaux touristiques… Au manque de moyens de Voies navigables de France (VNF) s’ajoute la pression urbanistique qui dégrade les abords du canal. L’ouvrage construit par l’intendant Pierre-Paul Riquet pour relier les deux mers (il est prolongé en 1857 par le canal latéral) a fêté en décembre les vingt ans de son inscription au Patrimoine mondial de l’Unesco. Mais il est en mauvais état et risquerait d’être déclassé, selon la sous-préfète Marie-Thérèse Delaunay, nommée directrice de projet du canal du Midi en mai 2016. « Les quatre exigences de l’Unesco sur la protection des paysages, le plan de gestion, la gouvernance et la zone tampon ne sont pas remplies », explique-t-elle. Faute d’y répondre, c’est un bien potentiellement menacé lors du prochain rapport d’évaluation de l’Unesco en 2019, martèle la sous-préfète avant d’ajouter : « Nous avons trois ans pour y remédier. »

L’arrachage des platanes malades a commencé en 2011. Ils sont remplacés par d’autres espèces, comme le chêne chevelu, le tilleul, le micocoulier et le peuplier blanc. Si 17.300 des 42.000 platanes ont déjà été abattus, seulement 5.000 arbres ont été replantés, au grand dam des communes riveraines, qui protestent contre la dévastation du paysage.

VNF évalue le coût à 220 millions d’euros sur vingt ans. Il devait être partagé en trois tiers entre l’Etat, les collectivités et des financements innovants. Mais, sur les 40 millions dépensés depuis 2011, les collectivités n’ont apporté que 1,5 million et le mécénat 3,3 millions… Le contrat de plan Etat-région 2015-2020 consacre 48 millions à la replantation.

Longtemps, les collectivités n’ont pas voulu financer les travaux au motif que le canal appartient à l’Etat et que l’entretien des berges est dévolu à VNF. L’aménagement en cours du site touristique des 9 écluses contiguës de Fonserannes par la communauté d’agglomération de Béziers est un exemple trop rare. « Il faut monter un projet de territoire autour du canal, plaide Marc Papinutti, directeur général de VNF. L’abattage des arbres a été un choc, puis il y a eu la replantation. Maintenant, un comité de bien a été installé et il y a une réappropriation du canal par tout le monde. »
Maisons éclusières

Créé en juin, le comité de bien coprésidé par le préfet Pascal Mailhos et la présidente de la région Occitanie, Carole Delga (PS), a tenu ses premières assises en janvier. Elles ont réuni 250 participants dont les 90 communes, les 4 départements, les associations… Objectif : élaborer un plan de gestion détaillé comme le demande l’Unesco. Six chantiers sur la navigation, les ports, l’environnement, le patrimoine, la culture et le fret seront approfondis dans des ateliers en février. Le plan de développement a été évalué à 230 millions d’euros d’ici à 2021, dont 120 millions de l’Etat et 40 du conseil régional. Il reste à trouver 70 millions.

L’autre chantier consiste à mettre sur pied, d’ici à la fin de l’année, une nouvelle gouvernance associant Etat et collectivités, une première. « On créera un groupement d’intérêt public qui pilotera le plan de gestion et sera garant auprès de l’Unesco », dit Marie-Thérèse Delaunay. En partageant la gouvernance, les collectivités seront-elles prêtes à cofinancer la restauration ? « La gestion des berges et l’entretien des écluses doivent rester à VNF », répond André Viola (PS), président du Conseil départemental de l’Aude. Pour lui, les collectivités peuvent participer à la replantation et à l’entretien des maisons éclusières pour développer le tourisme. Le fait qu’une seule région englobe désormais la voie d’eau permettra d’avancer plus vite. Pour Carole Delga, « il est urgent que l’on se mette tous autour de la table pour sauver le canal et créer un accueil touristique à la hauteur de ce patrimoine exceptionnel ».
Laurent Marcaillou, Les Echos
Correspondant à Toulouse

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