Le canal du Midi sera classé monument historique pour rassurer l’Unesco – L'Officiel du Canal du Midi

Le canal du Midi sera classé monument historique pour rassurer l’Unesco

Inscrit au patrimoine mondial depuis 1996, le canal n’était pas considéré dans sa totalité comme un monument historique. Un fâcheux oubli réparé…
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Le préfet veut aller vite. Pascal Mailhos, préfet de la nouvelle région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, devrait inscrire l’intégralité du canal du Midi aux monuments historiques avant l’été. Aussi surprenant que cela puisse paraître, l’ancien canal royal du Languedoc creusé sous le règne de Louis XIV entre Toulouse et Sète n’a été que partiellement protégé par la loi lors de son inscription au patrimoine mondial en 1996. Vingt ans plus tard, l’Unesco réclame des comptes. Pour la première fois, l’État reconnaît que l’Organisation des Nations unies pourrait bel et bien retirer son précieux label à l’ouvrage, destination touristique majeure menacée en raison d’un flagrant manque d’entretien et de laxisme dans la gestion de ses abords. C’est « un risque qu’on ne doit pas prendre », souligne Jean-Marc Sabathé, préfet de l’Aude, dans un rapport de 62 pages remis au préfet de région le 28 janvier dernier.

Le représentant de l’État à Carcassonne avait été chargé d’une « mission bons offices » en septembre, à la suite de la jacquerie des élus locaux qui ont refusé un premier projet de protection des abords du canal dans la plupart des 90 communes rurales traversées. Faute d’un consensus politique sur la notion juridiquement plus légère de « site classé », M. Sabathé préconise de sortir l’artillerie lourde. La loi sur les monuments historiques instaure de facto une zone tampon de 500 mètres de part et d’autre du canal où toute construction doit recevoir l’aval de l’architecte des bâtiments de France. Avant d’être finalement classé en 1996, le fabuleux « escalier d’eau » des écluses de Fonserannes, aux portes de Béziers, s’est vu affublé dans les années 70 d’une « pente d’eau » en béton qui n’a jamais fonctionné. D’autres ouvrages historiques, comme l’écluse ronde d’Agde ou la double écluse de Matabiau, en face de la gare de Toulouse, ont été défigurés par des travaux d’une modernisation finalement avortée. Ces balafres sur l’ouvrage se doublent aujourd’hui d’une invasion de laideurs périurbaines sur les berges du canal. Cette nouvelle lèpre est d’autant plus visible que l’écran des platanes centenaires, touchés par un champignon mortel, disparaît sous l’effet des tronçonneuses. Le préfet de l’Aude cite notamment la zone commerciale qui a poussé aux abords de l’écluse du Fresquel, à la sortie de Carcassonne, et les éoliennes. On pourrait y ajouter la marée pavillonnaire cernant le charmant hameau du Somail, dans la périphérie de Narbonne, en dépit des risques d’inondations du secteur.
Des divergences entre les élus et l’État

Dans un geste diplomatique à l’attention des élus, le rapport Sabathé préconise de les associer dans une « nouvelle gouvernance » sous la forme d’un « groupement d’intérêt public » (GIP). C’est une main tendue à Carole Delga. La nouvelle présidente (PS) de la grande région sera-t-elle sur la ligne intransigeante des anciens présidents du Languedoc-Roussillon, qui traînaient les pieds à l’idée d’investir dans le canal au prétexte que l’ouvrage appartient à l’État ? Ou sur celle plus conciliante de Martin Malvy, son mentor du Midi-Pyrénées, qui avait accepté d’apporter son obole au nom du pragmatisme. Sans attendre la réponse, le préfet de région a déjà lancé la procédure de recrutement d’un haut fonctionnaire qui sera chargé de mettre ce nouvel outil sur les rails. Pascal Mailhos doit aussi recevoir jeudi à Toulouse les membres de l’association des biens français au patrimoine mondial. Il est facile de deviner quel sera le menu lors de ce déjeuner.
correspondant à Toulouse, Stéphane Thépot – www.lepoint.fr